dimanche 22 mars 2020

Lettre aux adhérents N°18 - Pendant la traversée immobile

Chers amis,
Cette lettre vous est envoyée alors qu'un nouveau et cruel épisode, à portée universelle, surgit en cette période de préparation vers Pessah/Pâques, un an après l'incendie de Notre Dame.
Le virus nous a obligés à annuler notre prochaine conférence et mettre en suspens tout le reste de notre programme 2019-2020, mais nous espérons surtout qu'il n'atteindra aucun d'entre vous ou vos proches, ou en tout cas sans dommage.
Prière difficile à exaucer face à une si brutale contagion, surtout pour ceux qui continuent à servir leurs concitoyens dans des conditions si difficiles et même insupportables, qui vivent en plus dans la crainte de transmettre ce mal en accomplissant leur devoir.
Nous espérons aussi que les conditions de confinement ne mettent personne dans une situation de solitude, et que parents, enfants et amis parviennent à se parler et se consoler grâce aux multiples moyens que notre monde moderne peut quand même nous offrir.

C'est un moment de vérité !
Ici et maintenant, nous devons choisir la Vie.
D'abord pour que le corps médical puisse accueillir les malades et gérer au mieux la saturation qui s'annonce,
sans les contraindre à choisir et trier selon des critères inhumains,
parce que nous n'aurions pas accepté assez tôt les mesures adaptées.
Et n'oublions pas tous ceux qui se mettent au service de la société tout entière pour le minimum dont nous avons besoin, qui méritent les mêmes égards.
Nous apprenons ainsi, chaque jour un peu plus, à réduire nos activités et notre consommation, pour faciliter le travail de ceux qui restent au service de tous.
Quel est mon vrai besoin ? Celui-ci vaut-il la peine que je mette la vie d'autrui en danger ? Puis-je m'en passer, au moins temporairement ?
Beaucoup stockent par peur, sage précaution, égoïsme, mimétisme : "Insensé ! : cette nuit même on te redemande ta vie. Et ce que tu auras mis de côté, qui l'aura ?" (Luc, 12, 13-21)
Cheminer vers l'essentiel, le strict nécessaire : chacun de nos gestes doit être pesé avant tout à l'aune du bienfait qu'il apporte à son prochain.
Les conséquences d'un tel arrêt brutal et long de notre économie, jusqu'alors en croissance continue et, nous le savions, si destructrice, seront profondes et cruelles, mais aussi, nous verrons bien, bénéfiques.
C'est le sens du confinement, de ce brutal éloignement social et amical dont le but paradoxal est de sauver des vies, de nos achats qui doivent cesser d'être frénétiques, pour se réduire durablement à l'essentiel vital pour tous.
 
Ce que nous perdons en liberté civile,
dans une égalité imposée par le même risque viral pour tous
(même si les conditions pour l'éviter ou le subir ne sont pas les mêmes),
nous devons le rattraper dans la fraternité choisie,
qui peut toucher tous les cœurs,
croyants ou non croyants,
de ceux qui donnent et ceux qui reçoivent.
Sachons nous rendre disponibles, par la prière et si possible par l'action, auprès du malade, du pauvre et de tous ceux qui souffrent.
 
Beaucoup ne pourront pas, pour le bien commun, revoir leurs familles et amis, pour un dernier adieu avant leur dernier souffle.
Ils ne seront même pas accompagnés à leur dernière demeure.
Que d'inquiétudes et de souffrances à venir !
Nous avons bien sûr aussi la mission d'amener par la prière tous nos frères vers le Père qui est au Cieux, qui accueillera tous les morts que les vivants porteront chaque jour dans leurs intentions.
 
Mais pour les tourner vers cette clarté salvifique,
il faut d'abord servir son frère, tel qu'il est, à côté de nous,
en transformant nos pensées, nos paroles, nos actes et nos omissions,
en se demandant, avant d'agir,
quel bien nous pouvons lui apporter,
ou quel mal nous pourrons lui épargner.
Voici venu le temps de la charité dans la vérité et la fraternité !
Prions aussi pour qu'elle domine la violence qui peut surgir à tout instant des inquiétudes et promiscuités de cette interminable traversée immobile.
 
Car il nous faut aussi garder nos forces,
pour l'après qui sera terrible,
pour aider encore nos prochains (peut-être aussi nous-mêmes) qui auront été jetés dans la misère si brutalement,
une foule innombrable sur toute la terre,
pour s'adapter à une vie plus centrée sur nos voisinages retrouvés, nos besoins élémentaires,
pour se remettre au travail et reconstruire un monde d'abondance frugale,
sous une atmosphère assainie,
et dans un monde,
pourquoi pas ?
meilleur.
 
A bientôt pour des nouvelles de reprise de nos activités.
Avec toute notre fraternelle amitié,

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